Les conséquences d’un Brexit “dur”, en cas d’absence d’accord avec le Royaume-Uni, pourraient être lourdes pour les vignerons : nouvelles règles d’étiquetage, certifications d’analyse pour chaque lot de vin… À six mois de l’échéance, plusieurs points cruciaux restent en suspens.

La sortie de la Grande-Bretagne de l’Union européenne est entourée de nombreuses incertitudes, notamment pour les vignerons français qui vendent du vin dans cette région. À six mois de l’échéance, le 1er janvier 2021, les conséquences fiscales et douanières pour les vins commercialisés au Royaume-Uni après cette date ne sont pas claires.

“La seule chose que l’on sait, c’est que l’on ne sait pas grand-chose”, admet Nicolas Ozanam, délégué général de la fédération des exportateurs de vins et spiritueux (FEVS) qui se montre catégorique sur un point : “les échanges entre l’Union européenne et les pays tiers donnent lieu à des formalités douanières. Ce sera le cas en 2021, sauf si un accord commercial entre Bruxelles et Londres vient fixer des règles plus simples, plus souples”.

Les vignerons français désinformés

> De gauche à droite, Tim Ford, directeur général du domaine Gayda, Vincent Chansault, directeur technique & David Chardron, directeur commercial.

Tim Ford, vigneron au domaine Gayda dans l’Aude (1,4 M de bouteilles) a été prévenu, au début du confinement, par son importateur Cambridge Wine Merchants : dans la perspective d’un “no-deal” (absence d’accord), ce Britannique implanté depuis 15 ans en Languedoc devra ouvrir tous ses cartons destinés au marché britannique, décoller les contre-étiquettes des vins pour en apposer de nouvelles et procéder à une analyse complète des jus (degré alcoolique, acidité volatile, matière sèche, etc).

Un casse-tête administratif, car avec 800 000 bouteilles commercialisées en Europe, l’Angleterre est son deuxième marché. “Pour deux palettes avec un panaché de 12 vins différents, cela représente un coût supplémentaire de 240 € pour l’habillage et 360 € pour l’analyse des vins en laboratoire”, calcule rapidement ce vigneron.

Huit contre-étiquettes

Depuis un peu plus d’un an, afin de s’affranchir des intermédiaires, il travaille en direct avec une dizaine d’importateurs anglais, des chaînes de magasins (Majestic), de restaurants (le Café des amis), des grossistes (Oxford Wine Company, HHC).

Mais ce système cousu-main n’est plus viable en l’absence d’accords post-Brexit. “Il m’est impossible d’avoir huit contre-étiquettes et autant d’analyses pour des lots d’une ou deux palettes. Seuls les très gros volumes permettraient d’amortir les coûts, ce qui nous fait perdre toute notre flexibilité sur le marché britannique”, explique ce producteur qui se dit totalement désinformé. “Je n’ai pas été contacté par mon interprofession (Interoc pour les vins pays d’Oc IGP, ndlr), personne ne sait rien”, affirme-t-il.

ARTICLE – LA REVUE DU VIN DE FRANCE